Jean-Jacques s’est arrêté à Iverdon chez son ami Roguin,
mais son séjour y devient vite dangereux avec la condamnation de l’Emile à Genève et à Berne. La protection
de l’Ecossais George Keith, « Milord Maréchal », qui gouverne la
principauté de Neuchâtel pour le compte du roi de Prusse, lui permet de
s’installer à Môtiers dans une maison appartenant à la famille Boy de la Tour.
Thérèse l’y rejoint. Il travaille à son Dictionnaire
de musique et se fait de nouveaux amis, dont DuPeyrou, mais il a des
difficultés avec le pasteur du lieu, accrues par les polémiques suscitées par
ses Lettres écrites de la montagne en
réponse à ses adversaires genevois ; par sa renonciation au droit de
bourgeoisie genevoise… La « lapidation de Môtiers » le force à
chercher un autre asile. Les autorités bernoises semblent d’abord autoriser sa
résidence à l’île de Saint-Pierre du lac de Bienne, mais il reçoit bientôt un
ordre d’expulsion. Parti d’abord, sur les conseils de Milord Maréchal pour
Berlin, il décide d’accepter l’offre d’asile outre-Manche du philosophe David
Hume.
Jacques Voisine
Dictionnaire de Jean-Jacques Rousseau
Les représentations du douzième épisode ont débuté le 28 juin 2012
INDEX DES PERSONNES CITÉES DANS CET ÉPISODE
Julie-Anne-Marie Roguin (1715-1780) avait épousé en 1740 Pierre Boy de
la Tour, négociant neuchâtelois fixé à Lyon. Devenue veuve après dix-huit ans
de mariage, elle géra la maison de commerce laissée par son mari. Pendant plus
de douze ans, Rousseau entretint avec Madame Boy de la Tour une correspondance
régulière et la chargea de nombreux achats et commissions à Lyon.
Victor de Gingins, seigneur de Moiry, bailli d'Iverdon de 1758 à 1765.
Anne-Marguerite Boy de la Tour (1704-1781), belle-soeur de l'amie de
Rousseau, épouse du major J.-J. Girardier.
George lord Keith, maréchal héréditaire d'Ecosse, plus connu sous le nom
de milord Maréchal, né vraisemblablement en 1686, avait pris parti pour le
Prétendant (de la maison Stuart) à l'avènement de George 1er. Lors de la fuite
du Prétendant sur le continent en 1716, lord Keith se mit au service du roi
d'Espagne. Il prit part à la guerre contre l'Empire, puis voyagea à travers
l'Europe, vécut à Venise et passa finalement au service de la Prusse. En 1751,
il fut nommé ministre de Prusse à la Cour de France et en 1754, gouverneur de
la principauté de Neuchâtel. Au moment où Rousseau fit sa connaissance, milord
maréchal avait 76 ans. Quelques mois plus tard, il quittait la principauté,
fatigué par les querelles intestines d'un petit peuple qu'on lui avait dit
pacifique. Sans plus remettre les pieds à Neuchâtel, il conserva sa charge de
gouverneur jusqu'en 1768 et se retira à Sans-Souci, dans une maison que le roi
avait fait construire pour lui. Il devait mourir en 1778, à 96 ans, un mois
avant Jean-Jacques.
Pierre-Alexandre Du Peyrou, né à Surinam (Guyane hollandaise) en 1729,
avait été élevé en Hollande dès l'âge de dix ans. Sa mère, devenue veuve,
s'étant remariée avec un Neuchâtelois, Philippe Le Chambrier, colonel au
service des Etats-Généraux et commandant en chef de la province de Surinam,
vint habiter Neuchâtel en 1747. L'année suivant, le jeune Pierre-Alexandre
était reçu bourgeois de la ville. Il disposait d'une immense fortune dont il
fit l'usage le plus généreux. A l'âge de 40 ans, Du Peyrou épousa une jeune
fille de 19 ans, Henriette-Dorothée, fille d'Abraham de Pury, l'ami de
Rousseau. Du Peyrou fut l'ami le plus fidèle de Jean-Jacques. C'est lui qui, au
lendemain de sa mort, entreprit, de concert avec Moultou et Girardin, l'édition
générale des Oeuvres de Rousseau au
profit de sa veuve.
Frédéric-Guillaume de Montmollin (1709-1783), professeur de belles-lettres
à Neuchâtel de 1737 à 1741, pasteur à Môtiers de 1741 à sa mort.
Jean-Robert Tronchin (1710-1793), procureur général dès 1759, s'était acquis une grande réputation par ses réquisitoires à la fois éloquents et subtils.
François-Henri d’Ivernois (1722-1778), fut l'un des principaux liens entre Rousseau et les "Représentants" à Genève durant les années de crise 1763-1768. Fréquemment appelé à Neuchâtel par sa parenté ou par ses affaires, il en profita périodiquement pour aller passer un ou deux jours à Môtiers. Son admiration pour Jean-Jacques n'avait d'égal que son dévouement. Agacé par les obligations qu'imposaient ses cadeaux, Rousseau multipliait les rebuffades. A la longue pourtant, l'amitié de d'Ivernois le toucha mais à la suite d'une maladresse de celui-ci, ce fut la cassure et Jean-Jacques le décrira dans ses Confessions comme un opiniâtre qui l'avait subjugué "à force d'importunités".
David Hume (1711-1776) s'était fait connaître en France par ses essais de morale et de politique, publiés entre 1742 et 1751, puis par son History of Great Britain dont une partie, l'Histoire de la maison de Stuart sur le trône d'Angleterre avait été traduite en français par l'Abbé Prévost.
Jacob Vernes (1728-1791), consacré pasteur en 1752, devait exercer le Saint-Ministère dans diverses paroisses de Genève jusqu'en 1782 où il fut exilé avec les chefs du parti des représentants à cause de ses opinions politiques. Dès 1755, il publia un périodique, le Choix littéraire, pour lequel il sollicita plusieurs fois la collaboration de Rousseau, mais, lors de la publication de l'Emile, il se rangea parmi les adversaires de l'écrivain.
Claire Delon, épouse de Gabriel Cramer, imprimeur habituel de Voltaire, était une habituée des Délices. Dix-huit mois après la parution du Sentiment des citoyens, elle assura Du Peyrou que Vernes n'était pas l'auteur du fameux libelle, qu'elle en était sûre, mais qu'elle ne pouvait "nommer le véritable auteur sans être une coquine".
La principauté de Neuchâtel était divisée en vingt-deux juridictions, à la tête desquelles se trouvaient des maires ou des châtelains. Jacques-Frédéric Martinet (1723-1789) était depuis 1758 châtelain du Val de Travers.
M. Engel, receveur de l’Ile de Saint-Pierre
Emmanuel de Graffenried (né en 1732), seigneur de Worb, bailli de Nidau
Jean-Robert Tronchin (1710-1793), procureur général dès 1759, s'était acquis une grande réputation par ses réquisitoires à la fois éloquents et subtils.
François-Henri d’Ivernois (1722-1778), fut l'un des principaux liens entre Rousseau et les "Représentants" à Genève durant les années de crise 1763-1768. Fréquemment appelé à Neuchâtel par sa parenté ou par ses affaires, il en profita périodiquement pour aller passer un ou deux jours à Môtiers. Son admiration pour Jean-Jacques n'avait d'égal que son dévouement. Agacé par les obligations qu'imposaient ses cadeaux, Rousseau multipliait les rebuffades. A la longue pourtant, l'amitié de d'Ivernois le toucha mais à la suite d'une maladresse de celui-ci, ce fut la cassure et Jean-Jacques le décrira dans ses Confessions comme un opiniâtre qui l'avait subjugué "à force d'importunités".
David Hume (1711-1776) s'était fait connaître en France par ses essais de morale et de politique, publiés entre 1742 et 1751, puis par son History of Great Britain dont une partie, l'Histoire de la maison de Stuart sur le trône d'Angleterre avait été traduite en français par l'Abbé Prévost.
Jacob Vernes (1728-1791), consacré pasteur en 1752, devait exercer le Saint-Ministère dans diverses paroisses de Genève jusqu'en 1782 où il fut exilé avec les chefs du parti des représentants à cause de ses opinions politiques. Dès 1755, il publia un périodique, le Choix littéraire, pour lequel il sollicita plusieurs fois la collaboration de Rousseau, mais, lors de la publication de l'Emile, il se rangea parmi les adversaires de l'écrivain.
Claire Delon, épouse de Gabriel Cramer, imprimeur habituel de Voltaire, était une habituée des Délices. Dix-huit mois après la parution du Sentiment des citoyens, elle assura Du Peyrou que Vernes n'était pas l'auteur du fameux libelle, qu'elle en était sûre, mais qu'elle ne pouvait "nommer le véritable auteur sans être une coquine".
La principauté de Neuchâtel était divisée en vingt-deux juridictions, à la tête desquelles se trouvaient des maires ou des châtelains. Jacques-Frédéric Martinet (1723-1789) était depuis 1758 châtelain du Val de Travers.
M. Engel, receveur de l’Ile de Saint-Pierre
Emmanuel de Graffenried (né en 1732), seigneur de Worb, bailli de Nidau
Lexique du douzième épisode
Le Baillif de cette ville : le bailli était, dans l’Ancien Régime français, le représentant de
l’autorité du Roi ou du prince sur le territoire de sa juridiction (le
bailliage), où il était chargé de faire appliquer la justice et de contrôler
l’administration en son nom.
dans les Etats du Roi de Prusse je devais
naturellement être à l’abri des persécutions : en 1707 la principauté de
Neuchâtel avait été dévolu au Roi de Prusse, descendant des anciens suzerains
du pays. Il y avait union personnelle mais non réelle avec la Prusse.
J’avais d’ailleurs
remarqué que l’habitation des femmes
empirait sensiblement mon état : le commerce charnel.
il ne vit plus que Frédéric du moment qu’il lui fut
attaché :
Frédéric II de Prusse.
M. de Montmollin
vint me déclarer que lui et ses anciens : les Anciens d’église, choisis
parmi les hommes sages et pieux formaient avec le pasteur le Conseil de
paroisse.
J’avais longtemps cru qu’à Genève la compagnie des
Ministres, ou du moins les Citoyens et Bourgeois… : Au 18ème siècle, la
population de Genève se divisait en cinq classes : les citoyens, les
bourgeois, les habitants, les natifs, les sujets. Les citoyens et les bourgeois
étaient les seules classes qui prenaient part au gouvernement. Ensemble ils
composaient le Conseil Général ou Conseil souverain. A côté du Conseil Général,
il y avait cinq autres conseils, dont le Petit
Conseil, composé de membres à vie, et qui était notamment juge souverain
des causes criminelles. C’est lui qui condamna en 1762 Emile et Du contrat social
à être brûlés devant l’hôtel-de-ville parce que « tendant à détruire la religion chrétienne et tous les
gouvernements ». Les citoyens vont protester en présentant au
gouvernement des plaintes désignées sous le nom de représentations, et former
ainsi le parti des Représentants.
on brûla le livre je ne sais où : à la Haye, où
condamnées au feu par la cour de Hollande, les Lettres de la montagne furent brûlées le 22 janvier 1765.
Quelques temps après parut une feuille anonyme… : Le Sentiment des Citoyens, brochure de huit pages, parut le 27
décembre 1764. Voltaire en est le véritable auteur. Il se vengeait ainsi des
injures que lui avait dites Rousseau dans ses Lettres de la montagne.
… qui semblait écrites au lieu
d’encre avec l’eau du Phlegeton : l’un des principaux fleuves des
Enfers dans la mythologie grecque, auquel on attribuait les qualités les plus
nuisibles. Il entourait la prison des méchants.
et malgré les Rescripts réitérés du Roi : le rescript ou rescrit est un décret que l'autorité donne en réponse à quelqu'un sur un point au sujet duquel elle a été consultée.
Celle Ile allait devenir pour moi celle de Papimanie, ce bien-heureux pays où l'on dort. Où l'on fait plus, où l'on fait nulle chose : allusion au Quart Livre de Rabelais et, plus directement, au Diable de Papefiguière, conte en vers de La Fontaine.
Sa femme avait à Nidaw ses soeurs : Nidau, ville et chef-lieu d'un district bernois, situé à l'endroit où la Thièle sort du lac de Bienne.
et de n'y rentrer jamais sous les plus grièves peines : grief, griève : grand et fâcheux. L'expression est du langage juridique.
les deux Dames qui voulaient disposer de moi... : Madame de Boufflers et Madame de Verdellin.
... parvirent enfin à me livrer à leur ami : à David Hume.
et malgré les Rescripts réitérés du Roi : le rescript ou rescrit est un décret que l'autorité donne en réponse à quelqu'un sur un point au sujet duquel elle a été consultée.
Celle Ile allait devenir pour moi celle de Papimanie, ce bien-heureux pays où l'on dort. Où l'on fait plus, où l'on fait nulle chose : allusion au Quart Livre de Rabelais et, plus directement, au Diable de Papefiguière, conte en vers de La Fontaine.
Sa femme avait à Nidaw ses soeurs : Nidau, ville et chef-lieu d'un district bernois, situé à l'endroit où la Thièle sort du lac de Bienne.
et de n'y rentrer jamais sous les plus grièves peines : grief, griève : grand et fâcheux. L'expression est du langage juridique.
les deux Dames qui voulaient disposer de moi... : Madame de Boufflers et Madame de Verdellin.
... parvirent enfin à me livrer à leur ami : à David Hume.
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